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Contrat de vente / Terrain / Pollution / Obligation d'information / Champ d'application

Cass. Civ. III : 17.11.04 et 12.1.05


Depuis 1992, le Code de l'environnement (art. L. 514-20) impose à tout vendeur d'un terrain, bâti ou non bâti, d'information par écrit son cocontractant "qu'une installation soumise à autorisation" a été exploitée sur ce terrain. A défaut de le faire, il s'expose à ce que son acquéreur lui demande la résolution de la vente, la restitution d'une partie du prix ou la remise en état du site à ses frais lorsque le site s'avère finalement pollué.

Cette disposition ne peut faire l'objet d'aucun aménagement contractuel, contrairement à la garantie des vices cachés qui peut être exclue lorsque le vendeur est de bonne foi (Code civil : art. 1643). Il s'agit donc là d'une menace importante qui pèse sur le vendeur.

Dans l'arrêt du 12 janvier 2005, une commune avait acquis un terrain en 1994 sur lequel avait été exploitée une décharge jusqu'en 1980. La commune avait nécessairement eu connaissance de cette exploitation puisque la décharge avait fait l'objet d'une autorisation au titre de la législation sur les installations classées et que plusieurs arrêtés préfectoraux lui avaient été notifiés. Dans ces circonstances, la société venderesse n'avait pas jugé utile d'en faire mention par écrit dans l'acte de vente.

Mal lui en a pris puisque la commune demanda la résolution de la vente en raison de l'absence d'information sur l'exploitation de l'installation classée.

Sa demande fut rejetée par la Cour d'appel au motif que la commune ne pouvait ignorer qu'une installation classée avait été exploitée sur la parcelle acquise et avait entraîné des nuisances.

Cet arrêt est censuré par la Cour de cassation au motif que lorsqu'une installation soumise à autorisation a été exploitée sur un terrain, le vendeur de ce terrain est tenu d'en informer par écrit l'acheteur ; il doit également l'informer, pour autant qu'il les connaisse, des dangers ou inconvénients importants qui résultent de l'exploitation. En l'espèce, la Cour relève que la venderesse s'était abstenue d'informer par écrit l'acquéreur à l'occasion de la vente et en conclut que c'est à tort que la Cour d'appel avait rejeté la demande en résolution de la vente formée par la commune, peu importe que la commune ait eu connaissance de l'exploitation de la décharge à l'origine de la pollution du terrain.

L'arrêt du 17 novembre 2004 porte quant à lui sur la notion "d'installation soumise à autorisation" laquelle détermine le champ d'application de l'article L. 514-20 du Code de l'environnement. S'il ne fait aucun doute que les constructions soumises à la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations exploitées antérieurement à cette loi.

En l'espèce, une société avait acquis en 1962 un immeuble à usage industriel. En 1994, elle le revend à une société immobilière. A l'occasion de cette vente, un procès-verbal est établi contradictoirement attestant l'absence de produit toxique sur le terrain. Toutefois, en creusant le sol, la SCI découvre que celui-ci est pollué.

Une expertise, non contestée, révèle que la pollution est imputable à un précédent exploitant présent sur les lieux en 1928 et 1941. La SCI assigne la société venderesse en paiement des frais de dépollution.

La Cour d'appel accueille sa demande au motif que l'obligation d'information introduite par le Code de l'environnement s'appliquerait aux installations de la nature de celles soumises à la réglementation relative aux installations classées, datant de 1976, alors même qu'elles auraient cessé d'être exploitées antérieurement à son entrée en vigueur.

Cette solution imposait dès lors au vendeur de rechercher dans le passé si une installation classée, au sens de la loi de 1976, avait été exploitée sur le terrain par l'un des occupants successifs, avant même que cette loi n'existe et ce, sans aucune limite temporelle.

Ce raisonnement est censuré par la Cour de cassation. Selon la Haute juridiction, une obligation d'information ne pèse sur le vendeur qu'à condition que l'exploitation à l'origine de la pollution ait été au moment de son exploitation, au regard de la réglementation en vigueur à cette date, soumise à autorisation.

En conséquence, une installation dont l'exploitation s'est achevée avant 1976 peut entrer dans le champ d'application de l'article L. 514-20 à condition qu'au moment de son exploitation elle ait été soumise à autorisation, par exemple au titre de la loi de 1917 relative aux établissements dangereux, insalubres ou incommodes, ancêtre de la loi de 1976.

On ajoutera que si l'installation à l'origine de la pollution n'était soumise à aucune autorisation au moment de son exploitation, le vendeur qui en aurait connaissance devrait tout de même en informer l'acquéreur, car, dans le cas contraire il s'exposerait à la nullité de la vente pour réticence dolosive ou au jeu de la garantie des vices cachés, puisqu'une clause de non garantie serait inefficace dans ce cas (Code civil : art. 1643).

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